Des produits d’hygiène rechargeables pour libérer la salle de bains des déchets plastiques. L’innovation de 900.care a battu des records de crowdfunding. La marque est aujourd’hui aussi vendue chez Monoprix. Son cofondateur Aymeric Grange explique le rôle qu’ont joué les réseaux sociaux dans ce succès. Après Instagram et Facebook, la marque veut maintenant conquérir TikTok.
Comment est née l’idée de 900.care ?
Aymeric Grange : Avec mon associé, Thomas Arnaudo, nous faisions le même constat que beaucoup de gens : nous jetons énormément de déchets en plastique dans notre salle de bains. On a regardé des statistiques qui montraient qu’une famille jette en moyenne une dizaine de poubelles de salle de bains chaque année, remplies de déchets en plastique venant de produits d’hygiène. 75 % de ce plastique n’est pas recyclé, il finit incinéré ou dans la nature. Et des prévisions de la fondation Ellen McArthur indiquent que l’on pourrait avoir en 2050 plus de plastique que de poissons dans les océans. À la racine de tout cela, il y a le plastique à usage unique. Quand on finit une bouteille de gel douche, on la jette pour en racheter une nouvelle.
C’est ainsi qu’est née l’idée : garder ces bouteilles et ces flacons et les rendre réutilisables et rechargeables. Un gel douche traditionnel contient jusqu’à 90 % d’eau. Nous avons mis au point un gel douche solide, en ne gardant que les ingrédients actifs et en les compactant sous la forme de petits bâtonnets. Il suffit de les insérer dans la bouteille réutilisable et de rajouter de l’eau. On arrête alors de jeter du plastique. Pour rendre notre projet encore plus pratique, nous avons pensé à une formule d’abonnement pour recevoir les recharges de produit à une fréquence choisie. En plus, les recharges sont toutes pensées pour passer dans les boîtes aux lettres. Nous avons aussi travaillé sur un dentifrice, qui a pris la forme d’une petite pastille à croquer, sur une mousse nettoyante pour les mains, et plus récemment sur un déodorant rechargeable.
Pourquoi avoir choisi le crowdfunding, avec Ulule puis KissKissBankBank, pour vous lancer ?
Nous avions financé la R&D sur nos fonds propres et avec des investissements de notre cercle familial. Il nous fallait des moyens pour financer la production. Le crowdfunding nous permettait de lancer la fabrication grâce aux précommandes.
Au-delà, c’est l’aspect communautaire qui nous a attirés. Avec le crowdfunding, les gens ne sont pas uniquement dans une relation financière avec la marque, ils soutiennent un projet auquel ils croient. Avec leurs précommandes, ils permettent au projet de voir le jour. Aujourd’hui, les clients les plus fidèles sont ceux qui ont participé à nos premiers crowdfundings sur Ulule et KissKissBankBank. Ils ont vraiment contribué à l’aventure.
Vos campagnes de financement participatif ont battu des records, environ 40 000 précommandes sur Ulule et surtout plus de 60 000 sur KissKissBankBank. Quel a été le rôle des réseaux sociaux ?
Il a été déterminant. Avant même le lancement du crowdfunding, nous avions constitué une communauté de bêta testeurs, que nous avons recrutés via Facebook et Instagram. Une campagne de publicité, qui ne nous avait pas coûté très cher, où nous demandions aux gens s’ils accepteraient de recevoir des échantillons d’un produit en cours de mise au point. Plusieurs dizaines de milliers de personnes se sont inscrites. Nous avons pu profiter de leurs retours pour l’élaboration de nos produits, et de leur soutien lors des campagnes de crowdfunding. Ils ont contribué à un effet de viralité sur les réseaux sociaux.
Votre vidéo de lancement a aussi été très virale.
Elle a été vue plusieurs centaines de milliers de fois. Nous l’avons réalisée avec peu de moyens mais nous y avons investi beaucoup de temps et de réflexion. Elle incarne notre discours de marque. Nous voulions parler d’écologie d’une façon nouvelle, joyeuse, moins moralisatrice. Notre devise est Happy Change. 900.care représente les 900 secondes, 15 minutes, que nous passons chaque matin et chaque soir dans la salle de bains. Face aux enjeux environnementaux, il nous faut changer nos habitudes, mais nous pouvons le faire dans la bonne humeur, en commençant par ces 15 minutes pour soi dans la salle de bains.
Après cette vidéo de lancement, nous avons également pu compter sur une vidéo Brut qui a très bien marché, elle a été très likée, commentée, partagée. Nous l’avions financée, mais c’était aussi très affinitaire avec l’audience de Brut. Elle a contribué à faire s’envoler les précommandes sur KissKissBankBank.
Vous êtes maintenant aussi vendus chez Monoprix. Pourquoi ne pas être restés uniquement sur le digital ?
Nous ne réfléchissons pas en termes de canaux. Notre but, c’est d’offrir le plus de praticité possible aux clients. Nous ne nous voyons pas comme un acteur digital, mais comme un acteur qui veut faciliter la vie des clients et être là où ils font leurs courses. Or la vaste majorité des courses d’hygiène se fait en lieux physiques.
Vous êtes restés très présents sur les réseaux sociaux…
Nous continuons en effet de communiquer fortement sur Instagram, où nous avons plus de 55 000 followers, et sur Facebook, près de 45 000. Nous voulons également développer YouTube, mais notre gros chantier est sur TikTok. Nous avons plus de 40 000 followers sur ce réseau. Nous avons recruté une personne qui travaille à temps plein sur TikTok.
Les différents réseaux ne touchent pas les mêmes cibles. Typiquement, TikTok nous permet d’aller chercher une cible plus jeune. Nous adaptons nos contenus pour chaque plateforme. Même si c’est très difficile de faire sur TikTok du contenu de marque. Dès que les utilisateurs voient un contenu brandé, ils passent très vite. En revanche, il est encore possible d’avoir des « reach » organiques très forts. Un contenu peut devenir facilement viral, ce qui est aujourd’hui moins le cas sur Instagram ou Facebook. Pour cela nous travaillons sur TikTok avec des influenceurs, des créateurs de contenu qui savent faire, et que nous laissons très libres sur la forme, autour bien sûr de quelques messages que nous voulons faire passer.
Quelle part de chiffre d’affaires vous vient des réseaux sociaux ?
C’est très difficile à dire, mais je pense même que pour quasiment 100 % de nos clients, il y a eu à un moment un « touchpoint » social. Les réseaux sociaux sont vraiment essentiels pour nous. Même les gens qui viennent de manière « organique », parce qu’ils nous ont vus dans la presse ou parce que des amis leur ont parlé de nous, sont aussi passés par Instagram ou par YouTube. Une personne qui achète un de nos produits a entendu parler de nous deux ou trois fois de façon différente, et c’est ce qui crée l’envie d’acheter.